Dans l’Auberge Sanglante, vous incarnez des tauliers véreux d’une auberge au début du XIXème siècle. Ca change des thèmes plaqués et des cubes en bois hein ?

Vous n’êtes pas sorti de l’auberge


Le thème de l’Auberge Sanglante se base sur un fait divers sordide survenu entre 1805 et 1833 à l’auberge de Peyrebeille en Ardèche, où un couple d’aubergistes assassinent leurs clients pour les détrousser. La légende voudrait que les époux Martin aient tué une cinquantaine de personnes. Cela ne sera jamais prouvé, les deux aubergistes étant guillotinés pour l’assassinat d’une seule personne, retrouvée dans les bois proches de l’établissement.

Cette sombre histoire a été portée au cinéma en 1951 par Claude Antant-Larat avec Fernandel dans le premier rôle. A noter qu'au moment où j’écris ces lignes, l’auberge est toujours ouverte, mais les habitudes ont heureusement changé…

Voilà, sinon, à part ça, le moral, ça va ? Parce que bon, le fait divers est sordide, mais le jeu en lui-même ne l’utilise que comme toile de fond, bien que ses mécaniques collent parfaitement bien au thème, et inversement.

Comment jouer à l’Auberge Sanglante


Le jeu dispose d’un petit plateau qui correspond à l’intérieur de l’auberge. En fonction du nombre de joueurs, chacun pose une clé qui correspondra à une chambre de sa couleur. Des clés neutres permettent d'accueillir d’autres clients. Car oui, dans l’Auberge Sanglante, l’ensemble des aubergistes se partagent la même auberge.

Vue d'ensemble de l'Auberge Sanglante.
Vue d'ensemble de l'Auberge Sanglante.

L’ensemble des futurs clients sont placés d’un côté du plateau, qui correspond à l’entrée de l’auberge. A l’autre bout se trouvera la sortie de l’auberge, où les clients qui ont survécu s’accumuleront.

Le jeu se déroule ensuite en trois phases.

L’accueil des voyageurs (le soir)
Le premier joueur commence par placer les clients dans l’auberge. Chaque client a un niveau et une couleur, cette dernière correspondant à son métier.

Les actions des joueurs (la nuit)
C’est la phase de jeu principale. Durant cette phase, chaque joueur à son tour pourra effectuer l’une des actions suivantes :
Corrompre un client. Vous prenez la carte de l’un des voyageurs dans l’auberge et jouez autant de cartes de votre main que le niveau du personnage (entre 0 et 3). A noter que vous pouvez corrompre les paysans deux par deux, ce qui facilite bien des choses. Il faut dire aussi qu’ils sont au bistrot de l’auberge, ce qui facilite les choses.
Construire une dépendance. Vous pouvez jouer une carte de votre main et la payer avec autant d’autres cartes de votre main que le niveau du voyageur que vous venez de poser. Les dépendances servent à enterrer les cadavres. Le niveau du personnage ayant construit la dépendance définira le nombre de cadavres que l’on peut y enterrer.
Tuer un voyageur. Prenez la carte de l’un des clients dans l’auberge, retournez la, face cercueil, sur votre aire de jeu, et payez-la avec autant de cartes de votre main que le niveau du voyageur assassiné. Il vous faudra par la suite l’enterrer pour pouvoir empocher ses richesses.
Enterrer un voyageur. De même, il vous faudra défausser le nombre de cartes de votre main correspondant au niveau du cadavre à enterrer. Vous devrez en plus disposer d’une dépendance de libre pour pouvoir l’enterrer dessous.
Passer et blanchir de l’argent. Si vous avez assez de points sur le plateau de jeu, vous pouvez les échanger dix par dix contre des chèques… Car attention : au delà de 40 francs de liquide, vous ne pouvez plus accumuler de l’argent.

Détail très important : chaque voyageur a une couleur correspondant à son métier, le tout illustré par une icône : des billets de banque pour corrompre, un cercueil pour enterrer, un flingue pour tuer ou encore une truelle pour construire. Lorsque vous jouez ces cartes pour payer une action, si l’action concernée correspond à la spécialité de la carte que vous avez en main, vous la gardez en main au lieu de la défausser.

Je m’explique : si vous tuez un voyageur de niveau deux, vous devez défausser deux cartes de votre main. Mais si les cartes que vous posez disposent d’un incône pistolet, vous les gardez en main plutôt que de devoir les défausser !

On fait deux fois le tour des joueurs, ce qui permet à chacun de jouer deux actions avant de passer à la phase de fin de tour.

La fin du tour (le matin)
La fin du tour est marquée par ces trois événements
L’enquête des forces de l’ordre. Si un joueur a sur les bras un cadavre qu’il n’a pas encore enterré et qu’un policier est toujours dans l’auberge, l’enquête commence. Le joueur paye alors 10 francs et perd son cadavre. Dommage !
Le départ des voyageurs. En partant, les voyageurs payent l’auberge, soit 1 francs au joueur correspondant à la couleur de la clé de la chambre.
Le paiement des salaires. Chaque joueur doit payer 1 franc par carte qu’il a en main.

Fin de la partie
Lorsque la file des voyageurs se termine un première fois, on la mélange et on les replace à l’entrée de l’auberge. Lorsque la pile se vide une seconde fois, la partie est terminée. Le joueur qui a le plus d’argent est le vainqueur.

Pas facile la vie d’aubergiste


Après un tour de jeu, les principes sont rapidement assimilées. L’Auberge Sanglante propose des mécaniques pas banales. Il faut toujours faire attention à ne pas se retrouver avec un cadavre sur les bras à la fin d’un tour où la maréchaussée serait encore dans les parages.

Il faut savoir prendre des risques, et bien optimiser ses actions : devez-vous tuer des personnages de niveau trois, qui rapportent 26 francs, ou vous contenterez-vous de personnages de niveau deux, plus faciles à tuer et à enterrer, mais qui ne rapportent que 18 francs ?

De plus, chaque dépendance que vous construisez ne vous permet pas seulement d’enterrer des cadavres, elles vous permettent aussi de débloquer certains “pouvoirs”, comme par exemple de défausser une carte de moins lorsque vous enterrez un cadavre. De quoi vous permettre de peaufiner votre stratégie.

Au gré des parties, on se rend compte de la myriades de stratégies qui s’appliquent à l’Auberge Sanglante, en faisant un jeu que l’on essaie pour son côté atypique mais que l’on garde pour sa qualité intrinsèque.

Ce qui marque surtout dans l’Auberge Sanglante ce sont ces illustrations. Très typées, elles ne seront certainement pas du goût de tous. Et pour cause : les clients représentés sont souvent antipathiques, voir très antipathiques. Tant mieux, car vous allez devoir tuer certains d’entre eux pour les détrousser ! Weberson Santiago et Luis Francisco, respectivement illustrateur et graphiste, ont fait un sacrément bon boulot.

A noter que la version solo fonctionne très bien, et permet de s'entrainer en vue des futures parties avec d'autres joueurs.


L'Auberge Sanglante, un jeu pour 1-4 joueurs de Nicolas Robert, illustré par Weberson Santiago et Luis Francisco, édité par Pearl Games pour des parties d'environ 45-60 min.
Age conseillé : 14+.
Culte, indispensable !

L'Auberge Sanglante

L’Auberge Sanglante est un jeu atypique à tout point de vue. De par son thème, ses illustrations et même de ses mécaniques, il se différencie des tonnes de jeux de société qui sortent régulièrement. Un jeu à essayer… mais pas avec des enfants.

La note : 6/6 (Culte, indispensable !)